
La peur
Rémi Fortin
La Compagnie « Passage d’Animaux sauvages » est encore à naître. Fondée par le comédien Rémi Fortin, elle sera destinée principalement à porter les projets de celui-ci, et de celles et ceux qui l’accompagnent. Acteur-créateur et catalyseur d’équipe sans être, à proprement parler, metteur-en-scène, et porteur de projet lorsqu’il lui semble avoir une intuition forte, il a créé son premier spectacle au sein d’une compagnie complice, L’Ecole Parallèle Imaginaire, dirigée par Simon Gauchet.
Comme le panneau routier dont elle tire son nom, et sur lequel sont dessinées de petites biches stylisées, la Compagnie Passage d’Animaux Sauvages rassemblera celles et ceux qui sont à la recherche de l’étrange poésie qui surgit là où on ne l’attend pas vraiment. Comme dans le fragment du spectacle Le Beau Monde dont elle tire son nom, elle se veut modeste, agile et joyeuse. Comme les biches du panneau, elle conviera à travailler en son sein celles et ceux qui aiment à sautiller par-dessus les barrières esthétiques, à questionner les imaginaires et les évidences, à introduire du trouble sur les autoroutes.
Synopsis
Pierre Ménard, comédien du XXVè siècle, se lance dans une conférence gesticulée sur le sentiment de peur dans la société européenne du début du IIIè millénaire. Pour tenter de la comprendre, il essaie d’effrayer son auditoire à travers différents stratagèmes qui lui ont été transmis. Il invoque les esprits de ses lointains ancêtres, les somme de se montrer pour nous terrifier.
Au cours de digressions inattendues et où point une forme de nostalgie, il en vient à se demander ce que les humains ont perdu en oubliant ce sentiment, et s’il ne serait pas possible, voire souhaitable qu’il ressurgisse un jour. Peut-être, d’ailleurs, que les ancêtres de Pierre Ménard finiront par se manifester au cours de la conférence, pour venir le hanter, charriant avec eux leur lot de terreurs ancestrales, de traumatismes transmis, de peurs refoulées.
Conception et jeu Rémi Fortin
Texte Adèle Gascuel
Regard extérieur et scénographie Simon Gauchet
En mai 2020, alors que j’interrogeais, pour préparer l’écriture du Beau Monde, quelques personnes de ma génération sur ce dont elles voudraient que des humains futurs se souviennent, une dénommée Charlotte m’a expliqué que, selon elle, le « plus difficile à comprendre dans le futur serait la souffrance et l’empathie ».
Cette idée d’un monde où la souffrance et ses corollaires, la peur et l’empathie, auraient disparu, étrange utopie de notre temps, à la croisée du transhumanisme, de la fin de l’Histoire et d’un fantasme sécuritaire, m’a hanté depuis. Comment raconterait-on, expliquerait-on la peur à quelqu’un qui n’en a jamais éprouvé ?
Cette utopie d’un monde parfaitement pacifié, dont seraient bannis des affects négatifs tels que la peur ou la violence, est-elle seulement souhaitable ? Peu à peu, cette réflexion sur la terreur et la violence m’a amené à m’intéresser aux genres du cinéma d’horreur et de la littérature d’épouvante, qui brassent ces obsessions depuis des décennies.
Issu d’une génération d’européens qui a grandi avec la vague idée d’une « fin de l’Histoire» – largement fantasmée – et qui est confrontée à un brutal retour des événements historiques, parfois terrifiants (guerres proches, montée du fascisme, changement climatique), il me semble que la peur, sa disparition ou son retour, sa conservation et sa transmission, sont des sujets de rêveries théâtrales intéressants, et, sans être directement politiques ou militants, d’une certaine actualité.
Comment envisagerait-on, dès lors, l’acte théâtral et l’incarnation, que d’aucuns définissent comme une tentative de comprendre ou de faire l’expérience de la souffrance d’un autre être?
Rémi Fortin a reçu le prix du jury du festival Impatience 2022 avec son premier spectacle « Le Beau monde », produit par la compagnie de Simon Gauchet, L’Ecole Parallèle Imaginaire.
Production déléguée : cie Passage d’Animaux sauvages (cie en cours de structuration) ; montage de production en cours.

Rémi Fortin a reçu le prix du jury du festival Impatience 2022 avec son premier spectacle « Le Beau monde », produit par la compagnie de Simon Gauchet, L’Ecole Parallèle Imaginaire.

Production déléguée : cie Passage d’Animaux sauvages (cie en cours de structuration) ; montage de production en cours.
Rémi
Fortin
RÉMI FORTIN a grandi à Massy-Palaiseau, en banlieue parisienne. Depuis sa sortie de l’école du TNS, en juin 2016, il a joué au théâtre sous la direction de Mathieu Bauer, Simon Delétang, Adèle Gascuel, Thomas Jolly, Frédéric Sonntag, Christophe Laluque, Anne Théron, Cendre Chassanne, Simon Gauchet, Olivier Martin-Salvan. A la radio, il travaille avec Blandine Masson, Christophe Hocké, Laure Egoroff, Juliette Heynemann. Au cinéma, sous la direction de Loïc Barché, Clément Schneider, Anna Luif, Arnaud Khayadjanian, Clemy Clarke, et Arnaud Simon.
En parallèle de son parcours d’interprète, il aime également inventer ses propres projets, dans lesquels il joue et dont il amène l’idée originale. Sans être metteur-en-scène, il propose à des camarades de mener ensemble une expérience théâtrale, à l’image de Ratschweg, son premier solo, marche-spectacle inspirée du Lenz de Büchner, carte blanche au TNS répétée en itinérance avec la metteuse-en-scène Charlie Droesch-Du Cerceau et le dramaturge Pierre Chevalier, au cours d’une traversée des Vosges à pieds entre Strasbourg et le théâtre du Peuple, à Bussang.
Pour son premier spectacle dans un cadre professionnel, Le Beau Monde, il propose l’idée d’un rituel de mémoire destiné à se reproduire tous les soixante ans pour conserver, par voie orale, la mémoire du XXIè siècle. Pour écrire cette création collective destinée à jouer dans et hors des théâtres, il rassemble à ses côtés les acteurs.rices Blanche Ripoche et Arthur Amard, ainsi que le scénographe et regard extérieur Simon Gauchet. Le spectacle, créé au CDN de Montreuil en juillet 2021, joue régulièrement dans plusieurs lieux labellisés, ainsi qu’au festival de théâtre de Milos, en Grèce, et au festival Impatience (Paris).
En tant que créateur, il aime à questionner le théâtre, son sens anthropologique et ses raisons d’être, et inventer des dramaturgies hybrides, souvent à la frontière de la science-fiction, qui permettent de requestionner nos mondes et nos imaginaires contemporains.
De 2018 à 2021, il est acteur associé au CDN de Montreuil, où il participe à la vie du lieu, joue dans plusieurs spectacles et dans des concerts-performances, et mène plusieurs projets d’actions culturelles. Depuis 2021, il intervient régulièrement auprès des élèves de l’EDT 91, école professionnelle publique à Courcouronnes, autour des enjeux de la « traversée du récit. », à partir de textes de Maurice Pons, Antoine Volodine…
Les saisons prochaines, il jouera dans la prochaine création de l’autrice-metteuse en scène Cendre Chassanne, Nos Vies Inachevées, pièce créée à la Scène Nationale du Havre en février 2023, et dans la prochaine création du metteur-en-scène Simon Gauchet, La Grande Marée, autour du mythe de l’Atlantide (création prévue à l’automne 2023).

